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Trop tard !

La neige vient de blanchir le sommet de la Vautisse.Le gel à 3000 est redevenu quotidien.  Trop tard ! Le dernier « glacier » de l’Embrunais a rendu l’âme à la fin de la première semaine de septembre.

Réfugié dans la petite cuvette sous la cime,il agonisait comme tous les glaciers, mais sa couverture de névé le protégeait jusqu’en août.Ainsi il repartait pour une année de plus, malgré le retrait de sa pente de glace terminale.  C'était un bonheur et une surprise en sortant de l'aridité des grandes pentes terminales de le découvrir et de faire quelques pas dans la neige. 

 Le 27 août, Bruno Esméric photographiait  « le glaçon » qui avait encore une belle dimension. On pouvait croire qu’il allait tenir. Mais la canicule est revenue . Le 2 septembre Yvan Sibourd immortalise sans doute le dernier, les ultimes moments de la glace au sommet de Vautisse et dans l’Embrunais.

Martial Bouvier (PNE) a constaté sa disparition complète le 23 septembre.

Cette année 2022, après un hiver famélique en neige, l'isotherme 0° est  monté bien au-dessus des 3000m  dès la mi-mai. A partir de là, la neige a disparu rapidement de toutes nos montagnes. La sécheresse s’est installée durablement jusqu’en août. Dès le début juillet la glace au sommet de Vautisse s’est retrouvée à nu sans la protection habituelle de l’albédo* de son névé. Il n’y aura pas le moindre regel nocturne jusqu’à la troisième semaine de septembre.

Il était là depuis le XIVème siècle, début du petit âge glaciaire. Il alimentait alors une langue de glace sortant sous sa cuvette d’alimentation, bien remplie, Il descendait vers le NE où des accumulations récentes attestent sa présence. C’était un temps où notre sommet ne s’appelait pas encore Vautisse, mais était désigné de manière approximative comme Grand Serre, Crête des Rougnoux, Rocheclaire…Le cadastre napoléonien de 1833 ne la nomme ni ne la figure pas en tant que tel. Il faut lire avec attention le remarquable travail d’Olivier Peyre « Visions de Réotier à travers ses cartes anciennes » pour apprécier la limpidité de nos cartes modernes et comprendre le chemin sinueux de nos toponymes. Bien sûr, personne n’a jamais fait allusion à notre glacier jusqu’à ce que les glaciologues contemporains et le PNE n’aient pris en compte sa singularité et l’imminence de sa disparition.

Les hivers à venir, s’ils sont généreux en neige, et froids, rempliront peut être à nouveau  sa cuvette. Il faudra pourtant plusieurs années, si le névé traverse les étés successifs pour que la glace ait des chances de se reformer. On peut toujours rêver !

Louis Volle

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