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Errance dans les archives communales

27 juin 2016

ERRANCE DANS LES ARCHIVES MUNICIPALES

La recherche d’informations sur la vie passée de notre commune nous conduit dans les combles de la mairie où sommeillent les souvenirs administratifs.  Des mètres de rayonnages donnent l’impression trompeuse qu’il suffira de dérouler en sens inverse la vie des habitants de nos hameaux.

Las ! Un vrai parcours du combattant attend celui qui veut mieux comprendre comment ont vécu nos parents et ancêtres. Il faudra donc beaucoup de temps pour restaurer une trame satisfaisante de la vie passée.

Au départ de cette exploration, une chose parait évidente : la centralisation administrative des Républiques successives pèse très lourd sur la capacité des élus locaux de gérer librement la vie de l’espace communal. En matière forestière, pastorale et hydrologique rien ne peut se faire sans avis, autorisation ou convention avec l’Administration des Eaux et Forêts devenue depuis l’ONF.

C’est elle qui déterminait les lieux de pacage, le nombre de têtes de bétail autorisé et la répartition entre ovins, bovins et caprins. Les conventions étaient quinquennales ou décennales et le conseil municipal devait voter la demande de reconduction ou proposer des aménagements de la convention. Pour construire les cabanes, les chemins, organiser la circulation des hommes et des bêtes il fallait l’autorisation de l’administration. En revanche, l’administration participait aux travaux avec ses agents et au financement.

L’administration fiscale avait l’œil sur tout. Il fallait déclarer les récoltes chaque année. De la vigne, au blé en passant par le bétail et la production de lait, le maire devait assumer la véracité des déclarations. Aprés un premier inventaire  la période de l’entre deux guerres, semble bien être la dernière d’une bonne vitalité de l’économie rurale traditionnelle à Réotier. Le paysan rotéïrolle était, sauf exception, un petit paysan (exploitant autour de 2 ha labourables) pratiquant une polyculture vivrière et un modeste élevage associant ovins, bovins et caprins.

C’est en 1923 que le nombre d’exploitants atteint un maximum : 46 mais pour des surfaces cultivables très modestes. La surface labourable tournait autour de 90ha dont seulement 27 à 30ha en céréales. Les rendements sont faibles, autour de 7 quintaux à l’ha si tout va bien. Heureusement avec  l’irrigation grâce aux canaux, les potagers sont prospères et les prés de fauche permettent d’assurer l’alimentation du bétail pour l’hiver.

 1980 : Juliette Vincent au biberon pour les agneaux. (Ph.J.P.Vincent).
 
En vérité seule l’utilisation des communaux permet aux paysans d’être des éleveurs. C’est ce qui explique la nécessité et la force des pratiques collectives, héritées depuis la nuit des temps. Il faut libérer un maximum de bras à la belle saison pour cultiver les champs et faucher. Il faut éloigner les bêtes des cultures et les nourrir sur les terres communes. Les femmes les entraînaient vers les « petites montagnes » de Truchet, Mikéou, le Villard ou Bouffard. En été, les génisses étaient regroupées avec un berger commun plus haut encore, tandis qu’un berger communal, payé par la commune, pâturait les alpages depuis les cabanes de l’Alp, la Selle ou le Vallon. Le rôle de ce dernier est attesté dans les registres communaux : en pleine guerre de 1914-18, le conseil municipal demande un sursis et une dérogation au ministère de la guerre pour récupérer le berger Amable Brun. La commune ne trouve pas de berger compétent pour le remplacer. L’économie de la commune est en danger. Quand il y a sécheresse comme en 1921 ou 1941 le troupeau commun est gardé plus longtemps et le conseil municipal doit voter une rallonge de salaire pour le berger.
Pour aider les éleveurs à améliorer leurs conditions de travail et la qualité de leur production la commune initie en 1926  la mise en place d’une fruitière au Goutail. Elle fonctionne à partir de 1929 et durera jusqu’à la guerre 1939-45. Les bouleversements économiques et sociaux, avant tout la concurrence du ramassage industriel pour la société Nestlé, la font alors disparaître. En 1948 elle est désaffectée et mise en location. Si des formes traditionnelles  persistent plusieurs années, la « révolution » agricole est rapide. L’une après l’autre les exploitations disparaissent, les jeunes s’en vont ou se reconvertissent dans des activités industrielles, touristiques ou dans les administrations. On passe de 42 exploitants en 1952 à 8 en 1991. Le niveau actuel de 4 est atteint avant 2000.
 
 
Déclaration de cheptel 1991.

Dés cette époque la commune recherche la venue de troupeaux des communes voisines. L’idée de l’élargissement du recrutement et de la mise en communs des moyens est en marche. Le groupement pastoral de l’Alp mis en place à partir de 1988, illustre cette évolution.